Des loyers en tenaille à Paris
Par Laurence Allard – Publié le 28 juillet 2015 à 09h25
Des loyers en tenaille à Paris
Par Laurence Allard – Publié le 28 juillet 2015 à 09h25
À partir du 1er août, les loyers sont encadrés dans la capitale, selon deux critères : leur localisation et leur nombre de pièces. Mode d’emploi.
On en parle depuis longtemps ! C’est désormais chose faite ! À partir du 1er août, les loyers à Paris sont encadrés. Comme l’avait promis François Hollande, comme l’a mis en œuvre Cécile Duflot dans la loi Alur, les propriétaires ne pourront plus dépasser un « certain » prix au mètre carré. Son montant a été établi par l’Observatoire des loyers de la région parisienne (Olap) en fonction de quatre critères. La localisation, tout d’abord. Paris a été divisée en 14 secteurs et 80 quartiers. Deuxième critère : le nombre de pièces (1, 2, 3 ou 4 et plus). La date de construction de l’immeuble, ensuite : avant 1946, entre 1946 et 1970, entre 1971 et 1990 et depuis 1990. Enfin, le type de location : meublée ou pas.
Pour chaque type de bien, l’Olap a établi un loyer de référence égal au loyer médian constaté sur le marché (50 % sont en dessous, 50 % au-dessus). Puis il a calculé le plafond de loyer autorisé en majorant ce loyer de référence de 20 %. Enfin, il a établi un loyer minimal égal au loyer de référence minoré de 30 %. Ces montants fixés par arrêté préfectoral sont majorés de 10 % en cas de location meublée. Un exemple : dans le quartier de la Madeleine, un deux-pièces vide dans un immeuble pierre de taille se loue en moyenne 26,6 euros au mètre carré. Le plafond autorisé s’élève donc à 31,8 euros au mètre carré et le loyer plancher, à 18,6 euros au mètre carré.
Pour connaître précisément le loyer du bien que vous possédez ou que vous louez, cliquez sur la carte interactive de l’Olap. Elle vous donnera ces trois chiffres pour tous les biens, quel que soit le quartier.
Un locataire sur cinq serait gagnant
Il existe également une dérogation à cette règle générale. Elle concerne les biens dits exceptionnels, car ils jouissent d’une vue, et les biens dans lesquels de gros travaux ont été effectués. Le plafond est alors calculé en appliquant au loyer de référence une majoration de 40 %. L’entrée en vigueur de ces dispositions se passe de la manière suivante : si vous louez à l’intérieur de ces deux bornes, pas de souci, vous êtes dans votre bon droit ; si vous louez plus cher que le plafond autorisé, vous devrez, à l’occasion du renouvellement du bail ou du changement de locataire, vous aligner sur le plafond autorisé ; et si vous louez moins cher que le loyer plancher, vous pourrez, à ces deux échéances, le relever. Ces seuils seront révisés chaque année en fonction de l’évolution du loyer médian. Voilà pour la loi !
Dans la pratique, même s’il vous reste du temps à courir, il est à craindre que votre locataire ne vous réclame dans le premier cas une diminution immédiate du loyer ou une réduction progressive. Il appartiendra au propriétaire de savoir s’il veut ou non conserver son locataire actuel. L’Olap a calculé qu’un locataire sur cinq devrait être gagnant. L’encadrement diminuerait les loyers de moins de 50 euros pour un tiers d’entre eux, de 50 à 100 euros pour un autre tiers et de plus de 100 euros pour le dernier tiers. Et, parmi ces derniers, 10 % pourraient bénéficier d’une baisse de plus de 240 euros. Le site meilleursagents.com est moins optimiste. Seuls 15 % des locataires en profiteraient. A contrario, 25 000 locataires, selon la Confédération nationale du logement de Paris, pourraient voir leur loyer grimper. Et cette dernière de citer l’exemple de Sébastien, résidant dans le 13e arrondissement : « Son loyer devrait passer de 18 à 22,1 euros au mètre carré. »
Contentieux
« L’encadrement aura plus d’effets pervers que d’effets bénéfiques », dénonce François Davy, président de Foncia. « Un appartement loué 10 000 euros par mois dans les beaux quartiers va diminuer de 30 %, alors que, dans les quartiers populaires, un loyer bas risque d’augmenter de 10 %. »
L’application de l’encadrement devrait également générer des contentieux. Certains propriétaires devraient, en effet, contester la pertinence du découpage des quartiers ou la fiabilité des échantillons sur lesquels ont été définis les loyers de référence. Les locataires pourront également contester les loyers qui leur sont appliqués devant les commissions départementales de conciliation.
« Plus fondamentalement, l’hyper-réglementation risque de décourager l’investissement locatif à Paris », dénonce Christophe Tanay, président de l’Union des syndicats de l’immobilier (Unis).
François Davy met aussi en garde contre la diminution de l’effort d’entretien du parc locatif. Son groupe constate déjà une baisse du taux de travaux de 32,5 % en 2011 à 16,5 % en 2014. « Est-il logique qu’un appartement propre, confortable, bien isolé soit proposé au même prix qu’un logement mal entretenu ? » surenchérit Thierry Langlois, directeur immobilier de Vivastreet.com. Réclamé par Martine Aubry, l’encadrement des loyers devrait être étendu à Lille l’an prochain.
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