Pour fêter ses 50 ans, la Maison ronde a fait peau neuve. Visite guidée.
Maison de la Radio – Musique maestro !
« Informer, cultiver, divertir, partager ». Afin de continuer à remplir ses missions, un demi-siècle après son inauguration par le Général de Gaulle et André Malraux, l’emblématique Maison de la Radio s’est refait une beauté. A grands frais ! Cinq ans de travaux (désamiantage, mise aux normes anti-incendie, parvis/parc public, parking souterrain…) pour un coût de 386 millions d’€. Il est vrai que 14 millions d’auditeurs quotidiens et 120 000 spectateurs annuels réunis à travers 200 concerts, restent fidèles à ce « camembert » amarré aux berges sud du XVIe. Le maître d’œuvre de ce lifting d’envergure ? L’agence Architecture Studio qui a notamment conçu à Paris l’Institut du Monde Arabe et récemment rénové le campus de Jussieu. Pour réinventer la relation du bâtiment à la ville, les architectes ont revu ses espaces intérieurs, réorganisé les circulations, amélioré la lisibilité des espaces, et redonné une unité d’ensemble à l’édifice tout en rapprochant ses différentes fonctions. Le visiteur qui entre dans le grand hall découvre un nouvelle galerie qui mène à une agora circulaire coiffée d’une verrière. Cet endroit convivial baigné de lumière naturelle regroupe une cafétéria, un lieu d’expositions temporaires ainsi qu’un studio de radio ouvert. Et au-dessus de cette nouvelle rue intérieure qui permet de traverser l’antre radiophonique de part en part, de la Seine à la rue Raynouard, quatre passerelles vitrées relient désormais la grande et la petite couronne au niveau du 5e étage.
Vignobles boisés
Mais c’est sans conteste le nouvel auditorium pouvant accueillir près de 1 500 mélomanes qui s’impose comme la pièce maîtresse de cette restructuration. A l’abri d’une coque de béton posée sur ressorts, il offre de l’avis de tous une acoustique hors pair. Cette mécanique de haute précision est l’œuvre de l’acousticien Yasu Toyota du cabinet japonais Nagata Acoustics. Qui a aussi signé la bonne sonorité de la Philharmonie de Paris dessinée par Jean Nouvel ou du Walt Disney Concert Hall de Los Angeles conçu par Frank Gehry. « A l’image de la grande salle de l’Est parisien mais aussi de la fameuse Philharmonie de Berlin conçue par Hans Scharoun, cette nouvelle scène symphonique diffuse ses notes de musique au centre même du public, ce qui renforce leur complicité », commente Martin Robain, fondateur associé d’Architecture Studio. Asymétrique et très haute de plafond, cette arène qui déploie ses balcons en vignoble rapproche au plus près l’orchestre des spectateurs, jamais placé à plus de 17 mètres des artistes. Hêtre, bouleau, merisier… Cet écrin qui fait feu de tout bois est coiffé d’une lentille géante également en bois. Suspendue à 15 mètres en surplomb de la scène, elle renvoie les sons vers les musiciens et l’auditoire. Le grand auditorium fait aussi résonner à 12 mètres au-dessus du gradin des chœurs, un orgue monumental conçu par le célèbre facteur Barcelonais Gerhard Grezning : 5 300 tuyaux, 87 jeux, 4 claviers, 2 consoles, 1 pédalier. Mais ce véritable bijou de technicité qui pèse 30 tonnes n’est pas du goût de tout le monde. En effet, la Cour des Comptes a récemment épinglé sa facture jugée plutôt salée : 1,6 million d’euros ! Toutefois, grâce à ses plateaux modulables, la scène de 22 mètres de large et 15 mètres de profondeur, permet différentes configurations d’orchestre : concert philharmonique, musique de chambre, quators, concerto, récitals, et concerts avec… orgue, ouf !
Stars académie
Architecture Studio a également rénové de fond en comble le Studio 104 : ce lieu d’enregistrement mythique d’une jauge plus modeste (840 places), où se sont produits d’innombrables célébrités telles que Robert Plant, Eric Clapton, Carlos Santana, Sting ou encore Norah Jones. Trois ans après son dernier concert (Indochine) la salle rebaptisée Olivier-Messiaen a retrouvé sa couleur aubergine d’origine mais n’a pas récupéré son orgue parti rejoindre l’église Notre-Dame de la Treille à Lille. Il fait désormais place aux nouveaux gradins des chœurs tandis que cette salle de concert polyvalente (musique contemporaine, jazz, pop, rock, électro…) module ses sonorités “à la carte”, avec des rideaux acoustiques et des réflecteurs en staff. Les bas-reliefs du sculpteur cubiste Louis Leygue ont été conservés, tandis que sur les côtés de la scène, des parois en « pointe de diamants » ont été rénovées. Leur fonction ? Pouvoir briser le son lors d’un concert de rock, par exemple. En avant la musique !
Propos recueillis par Emmanuel Monvidran.